Emploi

Publié le jeudi 3 novembre 2016

La convivialité, point clef d’un recrutement efficace

Tout comme le reste de la société, le recrutement et le monde du travail évoluent pour s’adapter aux attentes de la nouvelle génération d’actifs. A l’heure où certains professionnels du recrutement rêvent d’ubérisation, d’autres préfèrent placer l’humain au cœur de leur entretien d’embauche en privilégiant les échanges et le dialogue. Selon Alain Charlès, fondateur des agences d’intérim Facilium, la convivialité est même un élément clef lui permettant d’aller dans le sens d’un recrutement plus efficace, aussi bien pour le candidat à un poste que pour l’entreprise à la recherche d’un employé. En quoi l’idée de convivialité est-elle plus que jamais d’actualité ? L’ubérisation telle qu’on la connaît aujourd’hui permet-elle d’obtenir un résultat meilleur ?

Mr Alain Charlès, vous dirigez actuellement 2 agences spécialisées dans le recrutement sur Rennes et Vitré. Pouvez-vous en parler en quelques mots ?

Avant la création de Facilium, j’ai travaillé durant 25 ans en tant que responsable d’agences et gérant franchisé pour des groupes dans l’intérim.
A l’échéance de mon contrat avec le franchiseur, j’ai décidé de lancer ma propre enseigne plus en adéquation avec mes valeurs, la convivialité dans le recrutement et le respect des demandeurs d’emploi.

La marque Facilium est ainsi apparue aux portes de Rennes, à Chantepie, puis, récemment, à Vitré.

Vous faites partie de ces dirigeants qui pensent que les méthodes de recrutement doivent évoluer. Pour vous, pourquoi et en quoi doivent-elles changer ?

En 2016, les entreprises attendent davantage d’une agence d’intérim, à commencer par plus de réactivité et plus de professionnalisme. Cela implique de trouver très exactement le candidat ou la candidate pour un poste donné, mais pas seulement. Il faut que la personne retenue soit productive, une bonne productivité passe par le plaisir de produire, c’est-à-dire quelle prenne plaisir à faire ce qu’elle fait.

Pour cela, encore faut-il avoir conscience que l’attente des candidats a également évolué. Si pour nos grands-parents le travail était une valeur, pour nos parents, c’était un devoir et pour nous, c’est une nécessité. Pour les jeunes, le travail devient une obligation et il doit donc être une source d’épanouissement et de plaisir.

Mon travail et celui de l’équipe est de bien connaître les entreprises, les postes, mais également nos candidats. C’est pourquoi, chez Facilium, la convivialité fait partie intégrante de tous les recrutements : CDI ou emploi temporaire, ce qui nous permet de mieux cerner les attentes du client et du candidat.
La bonne connaissance du besoin du client nous permet de mieux recruter le candidat.

Pouvez-vous expliquer en quoi consiste la « convivialité » lors d’un entretien ?

La convivialité n’est pas une recette que l’on applique à la lettre. Dans les grandes lignes, la convivialité c’est aussi de l’empathie. En psychologie, l’empathie est la capacité de ressentir les émotions, les sentiments, les expériences d’une autre personne ou de se mettre à sa place. C’est donc de s’intéresser au candidat aussi bien sur le plan professionnel que sur le plan personnel en se mettant d’égal à égal dans le respect du candidat afin de créer une certaine proximité.

Quels sont les éléments susceptibles de créer ce climat de « convivialité » ?

Lorsque je dois recevoir un candidat pour un entretien, même s’il arrive au rendez-vous en avance, je sors systématiquement de mon bureau pour le saluer et lui demander de patienter.
Nous offrons un café, un thé ou une boisson fraîche quasiment systématiquement à toute personne qui pousse la porte de nos agences rennaise et vitréenne.

Durant l’entretien lui-même, je ne reçois pas le candidat assis derrière mon bureau qui crée une barrière, mais autour d’une table ronde, qui met chacun sur un même pied d’égalité.
En général, je me présente rapidement avant de demander à la personne d’en faire de même. Enfin, je m’intéresse à ce qu’elle ou à ce qu’il fait en dehors du cadre professionnel.

En quoi la « convivialité » lors d’un entretien d’embauche est-elle importante ?

Le fait de mettre le candidat à l’aise, évite d’avoir en face de soi une personne qui perd ses moyens sous l’effet du stress ou, a contrario, qui joue un rôle et vous sert l’image qu’elle a envie de vous vendre.

Aussi bien pour l’entreprise qui m’a demandé de trouver le bon profil que pour moi-même, ce n’est pas ce qui m’intéresse. Je préfère savoir réellement à qui j’ai affaire, cerner la personnalité de la candidate ou du candidat qui est face à moi.
Pour cela, rien de tel que de se sentir un peu comme chez soi, à l’aise pour laisser transparaître sa véritable nature.

Est-ce que vous pensez que c’est une manière plus efficace pour mieux cerner la personnalité d’un futur collaborateur ?

Tout à fait. Il n’y a pas une candidate ou un candidat qui sorte d’un entretien avec moi sans que je ne sache précisément quel emploi je pourrai lui proposer et dans quelle entreprise.

Un emploi dans lequel elle ou il tirera satisfaction et plaisir au travers de l’accomplissement de son travail et des échanges avec ses collègues et sa hiérarchie. C’est la garantie d’une plus grande productivité et d’une diminution des risques de conflits liés au travail.

Il est d’ailleurs important de rappeler qu’il s’agit là de notre mission première : proposer un poste dans lequel le candidat se plaira, pourra évoluer et se faire embaucher. C’est pour cela que les entreprises pour lesquelles nous travaillons viennent vers nous et c’est comme ça qu’un candidat parle de nous à son entourage ce qui améliore l’image de nos agences.

Bien évidemment, dans le métier du recrutement, on a parfois quelques déceptions, mais on a surtout de très nombreuses satisfactions, tout du moins chez Facilium. Sinon, il vaut mieux changer de métier.

N’est-ce pas un peu perdre la notion de hiérarchie au détriment du copinage comme le dénoncent ceux qui défendent les méthodes traditionnelles de recrutement ?

Pour moi, un bon recrutement, cela passe d’abord par le respect de l’individu. C’est-à-dire, tout le contraire des postures agressives que l’on voit bien souvent, à deux ou trois recruteurs face à un candidat. Des postures qui instaurent d’emblée un rapport de force, n’apportent rien et produisent même l’effet inverse de celui recherché en nuisant à l’échange. Sur la défensive, le candidat ne laissera paraître qu’une image déformée de lui-même.

Créer un climat de confiance, de respect, de convivialité n’a strictement rien à voir avec du copinage et ne nuit en rien à la notion de hiérarchie. Par contre, cela permet de lever le voile sur une partie de la personnalité du postulant, de cerner plus précisément sa recherche, mais également de comprendre ce qu’il ne souhaite pas.

Est-ce que le fait de tutoyer quelqu’un fait perdre de son autorité face à lui ? Bien au contraire, je pense que parfois cela peut être un moyen de créer une ambiance sereine et une certaine proximité, sans pour autant tomber dans le copinage. D’ailleurs, copinage et convivialité sont deux choses totalement différentes.

Réseaux sociaux, entretien à distance, applications sur mobile, job dating, de nombreuses méthodes de recrutement jadis considérées comme marginales s’imposent petit à petit. Pour vous, est-ce compatible avec votre vision du recrutement ?

Application sur mobile, réseaux sociaux ou job dating sont des outils permettant un premier contact avec un candidat. Toutefois, aujourd’hui, il me semble qu’ils ne peuvent constituer à eux-seuls une méthode de recrutement fiable à proprement parler.

En revanche, ils peuvent se révéler utiles pour approcher des profils en vue d’un entretien face-à-face. Facilium participe d’ailleurs de temps en temps à des jobs dating, comme de nombreuses agences de recrutement de la région. Ce qui est amusant lors de ces rencontres, c’est que finalement, tous nos confrères qui n’ont que peu de temps pour attirer de nouveaux profils, jouent également la carte de la convivialité.

On constate actuellement l’apparition d’acteurs 100% digitaux sur le marché du recrutement. Pensez-vous comme Mr Marc Veyron, DRH Capgemini, que cette ubérisation est l’avenir ?

Le secteur du recrutement est effectivement en train de prendre une nouvelle orientation. Toutefois, tel que c’est proposé aujourd’hui, cela revient à faire correspondre des fiches avec des cases cochées par un employeur d’un côté et un candidat de l’autre. Cela permet donc de trouver un travailleur à qui on ne demande ni de réfléchir, ni d’être ce qu’il est vraiment, juste d’être performant dans son métier ou dans sa spécialité. Qu’en est-il de sa personnalité ?

Chaque entreprise à une âme et des valeurs. Les candidats que nous proposons doivent correspondre à cet état d’esprit. Les valeurs dans l’ubérisation, où les trouve-t-on ? Comment fait-on en automatique pour trouver des candidats qui vont porter les valeurs propres à l’entreprise, propres à l’équipe en poste ? Cette manière de recruter ne peut pas correspondre à tous les types d’entreprise.

Clairement, aujourd’hui, le recrutement « humain » est le seul qui permette de détecter des situations qui pourraient être compliquées. Avec l’ubérisation, on n’en est pas là aujourd’hui.
Ce système d’automatisation, aussi poussé soit-il, ne remplira jamais la dernière case qui est celle du feeling et de l’humain. Peut-être à moyen terme car les technologies évoluent rapidement.
Mais pour le moment, comme le souligne lui-même Mr Veyron, on en est aux prémisses (cf. article du 22 septembre 2016, sur LinkedIn, https://www.linkedin.com/pulse/lint%C3%A9rim-en-voie-dub%C3%A9risation-bonne-ou-mauvaise-nouvelle-marc-veyron?trk=prof-post).